Salon de lecture

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La sixième heure (J-J. Doucet)

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Titre:

La sixième heure

Auteur:

Jean-Jacques Doucet

Editeur:

Saint-Rémi

Date de   parution:

2014

 

L’auteur a choisi d’aborder un sujet grave et actuel, sous la forme d’un roman historique. Officier français, il aurait pu opter pour un docte exposé sur la nature intrinsèquement dangereuse de l’islam, qu’il a côtoyée de près, comme Denis, à qui il dédicace son livre, soldat de l’ombre retenu en otage 3 ans en Somalie, avant d’être froidement exécuté par ses geôliers au moment où se déclenchait l’opération qui visait à le libérer. Ou comme ces deux fillettes tuées dans des conditions similaires au moment de l’assaut qui devait mettre fin à une prise d’otages, également en Somalie, en 1975. Pour l’auteur, toutes ces victimes ont été explicitement tuées par le Coran, dans lequel il est écrit : « Et tuez-les où que vous les rencontriez ; et chassez-les d’où ils vous ont chassés : l’association [la croyance en la Trinité] est plus grave que le meurtre » (Coran, sourate II, verset 191). En revenant au IXème siècle, il met en parallèle d’une part cette religion violente et de domination, et d’autre part le christianisme, fondamentalement tourné vers l’amour et le pardon. Et cette présentation ne tient pas du tout d’un quelconque manichéisme arbitraire ou partisan, mais bien d’une comparaison objective des textes référents et fondateurs de chacune de ces deux religions. Car s’il est entendu qu’on peut parfaitement trouver des chrétiens se laissant aller à des meurtres ou exactions en tout genre, il n’en demeure pas moins qu’ils se rendent ainsi coupables au regard des Evangiles, à défaut d’être jugés ici-bas, alors que le musulman qui « tue ou crucifie [les mécréants], ou coupe leur main et leur jambe opposées » (Coran, sourate V, verset 33), est non seulement absout mais même exalté par le Coran. Et en Occident aujourd’hui, c’est encore l’Evangile, même perverti et expurgé de toute dimension supérieure, qui sert implicitement de référentiel à nos « valeurs morales » : fissent-elles profession de foi d’anticléricalisme, nos bonnes consciences actuelles, dégoulinantes de bons sentiments, doivent faire avec…

Sur un plan plus divertissant, ce roman est l’occasion de suivre le cheminement des personnages principaux, dans ce IXème siècle, des Asturies au Mont Cassin et à Rome, en passant par la Septimanie, la Provence et les Pyrénées, aux confins de l’Aquitaine… Tout sonne juste : l’auteur connait parfaitement les régions traversées et le contexte historique. A ce sujet, le chapitre introductif brosse un tableau de la période, très utile à ceux qui ne maitriseraient pas parfaitement le IXème siècle ou qui auraient oublié des détails de leurs leçons d’histoire (au nombre desquels, très franchement, je me compte). Après la bataille de Clavijo, en 844 dans le nord-ouest de l’Espagne, contre l’occupant musulman, Miguel Cordobes, un cavalier asturien, part annoncer cette victoire à Rome et quérir quelque soutien dans le reste de la chrétienté pour ce qui sera la reconquête espagnole (et qui durera encore 650 ans !). Il retrouvera dans son périple son ami l’abbé Al Kader, Copte qui a fui l’Egypte et les massacres de sa communauté (eux, toujours d’actualité en 2014…) pour se retirer dans le monastère bénédictin du Mont Cassin. Voilà pour les personnages de fiction… Ensemble, ils en croiseront d’autres, parfaitement historiques, comme le pape Serge II, le roi Charles le Chauve et l’empereur Lothaire -deux des petits-fils de Charlemagne-, ainsi que d’autres seigneurs locaux, tous authentiques. Ils lèveront un petit détachement d’archers pour les escorter sur le chemin du retour vers Compostelle, où saint Jacques, qui serait apparu, selon certains, au cœur de la bataille de Clavijo, marque durablement son empreinte. Car les chemins ne sont pas sûrs : outre la rencontre toujours possible avec des brigands, la Méditerranée est infestée de barbaresques qui font de fréquentes et terrifiantes razzias dans les terres à partir de tout le littoral et, venant le plus souvent des cotes Atlantiques, les Vikings, qui ne sont pas encore christianisés, s’adonnent aux mêmes pratiques... Mais la plus grande désolation, qui justifie le titre du livre (la sixième heure est celle à laquelle est mort le Christ), apparait lorsque notre petit détachement entre en pays occupé par les Musulmans, qui imposent par le fer leur loi, si dure pour qui n’est pas soumis (traduction littérale de « musulman ») c'est-à-dire, à très peu d’exceptions près, tous les autochtones.

Lorsque nos héros ne se battent pas pour se défendre, ce qui constitue tout de même la majeure partie du temps, ils marchent. Et ce mode de locomotion est évidemment bien plus propice à la méditation et aux réflexions que le TGV ! Cela est une grande richesse du livre, qui nous impose son rythme de voyage initiatique, au gré des interrogations et cas de conscience des protagonistes. Le plus grave dilemme que se posent ces soldats, pieux mais humains, réside dans l’obligation du pardon quand ils sont témoins de tant de barbarie de la part de leurs adversaires, ou encore dans la justification morale de la nécessité de tuer. Car ils donnent la mort assurément avec professionnalisme et sont capable de la recevoir, mais ils sont toujours accompagnés de la figure du prêtre qui, lui, ne touche pas aux armes et les guide incessamment par sa hauteur spirituelle vers cet idéal de charité. C’est cette paradoxale alliance « du sabre et du goupillon » (si l’on me passe cet anachronisme…) qui a fait l’admirable équilibre de la chrétienté : une civilisation encore assez virile pour se défendre et rayonner, mais dont les excès de violence étaient canalisés par des préceptes d’amour et de pardon. En sortant du Moyen-âge, et plus encore à notre époque contemporaine, marquée par les deux derniers siècles d’une insidieuse déchristianisation, cet équilibre est rompu. On a d’abord évincé l’ordre sacerdotal en sécularisant les principes moraux et métapolitiques puis, par un angélisme prométhéen, on a prétendu abolir l’ordre guerrier au nom d’un « doux commerce » eschatologique. C’est ainsi qu’il ne reste du legs de la chrétienté, dans notre (trop) vieille Europe, qu’une velléité d’un « amour universel », inconsistant, coupé de toute transcendance et même des réalités. Car face à la faiblesse de ce ramassis d’individus nombrilistes et hédonistes, le monde continue à secréter des races plus jeunes, plus viriles et plus violentes, comme on le voit de plus en plus à travers l’Islam. Selon toute vraisemblance, la confrontation, qui s’annonce imminente, ne tournera pas à notre avantage… C’est très bien résumé par la deuxième citation qui ouvre ce livre, de Ernst Wiechert : « Il avait fermé les yeux pour ne pas voir le mal sur cette terre, et c’était ainsi que le mal l’avait trouvé, sans défense. »

Certains objecteront à l’auteur que désigner le danger islamique le range du coté des Juifs… Là encore, c’est le signe de notre faiblesse, du cruel manque d’une identité assez forte pour sortir de cette dialectique ! Nous sommes toujours comme au temps de la guerre froide, où l’on ne pouvait que se ranger du coté communiste ou atlantiste : les partisans d’une « troisième voie » originale et européenne restaient des exceptions. Que ne pouvons-nous dire, sans être taxés d’antisémitisme (pour casser les pattes à une imbécillité qu’on entend trop souvent sur les « Arabes antisémites », il n’est peut-être pas inutile de rappeler que les Arabes sont aussi sémites que les Juifs Sépharades et probablement plus que les Juifs Ashkénazes ou Falashas), que le conflit israélo-arabe ne nous concerne pas, que nous n’avons pas à y prendre parti et surtout, que nous ne voulons pas qu’il se prolonge chez nous ?!

 

Georges

 

Complément documentaire

  • Du même auteur (sous le pseudonyme de Jean-Christophe Laxave), Café-sucre - solution d’une guerre en Côte d’Ivoire ?, L’Esprit du Livre éditions, 2011, toujours sous la forme du roman historique, mais sur un tout autre sujet.
  • Autre roman historique qui se déroule dans une période assez proche, mais vu du coté des Vikings, Frans G. Bengtsson, Orm le rouge, éditions du Porte-Glaive, 1986.
  • Dans les romans plus actuels sur l’invasion « pacifique » que connait l’Europe, et les conséquences de cette immigration, outre le classique et incontournable Camp des Saints de Jean Raspail, on peut lire d’Eric Zemour, Petit frère ou, plus ironique, de Pierre Jourde, Carnets d’un voyageur zoulou dans les banlieues en feu.
  • Sur une exégèse du Coran, Laurent Lagartempe, Petit guide du Coran : Tout ce que vous devez savoir de ce que dit vraiment le Coran, éditions de Paris, 2003 ou Anne-Marie Delcambre, L’Islam des interdits, Desclée de Brouwer, 2003.
  • Sur les relations entre chrétienté et Islam au Moyen-âge, Aristote au Mont St-Michel, de Sylvain Gougenheim, qui fait le point sur le prétendu apport musulman dans la redécouverte de la philosophie grecque.
  • Des analyses récentes sur la situation en Europe :

Guillaume Faye, Colonisation de l'Europe - Discours vrai sur l'immigration et l'islam, l’Aencre, 2000, dans lequel l’auteur avance que nous sommes à l’heure de la Reconquista à l’échelle européenne ;

Paul-François Paoli, La tyrannie de la faiblesse : La féminisation du monde ou l'éclipse du guerrier, Bourin éditeur, 2010, où l’auteur conclue son constat de la féminisation de notre monde (c’est, semble-t-il, aussi le thème de Le soldat impossible, que je n’ai pas encore lu…) par la confrontation avec un monde plus viril, en l’occurrence, l’Islam.

 



02/11/2014
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